Madame la Marquise...

Tenant son casque de ses deux mains, pressé sur le torse, le regard timide et inquiet, le garde du pont-levis se fit connaître.

J'aimerais signaler une arrivée à Madame la Marquise.
Peut-on la prévenir?

La Marquise alertée par l'arrivée d'une personne, profita d'un instant ou elle était à l'extérieur pour rencontrer Fauchevent, le garde qui semblait vouloir lui faire une annonce...

Fauchevent, vous me cherchiez ? Que se passe t-il ? Depuis quand osez-vous me demander en personne ? J'espère que ce que vous avez à m'annoncer est important, j'ai dû laisser mon enfant seule aux côtés des nourrices quelques minutes. Alors soyez bref et concis je vous prie !!

Le garde serra son casque, et ne sachant pas quel ton employer, finit par bredouiller quelque chose comme:

Ben M'dame la Marquise, s'fait qu'vot' époux, Aristote le garde, vient d'sonner au portique et d'rentrer au ch'teau.

Selon Fauchevent, à partir de cet instant tout pouvait arriver, tant il ignorait quelle serait la réaction de la maîtresse des lieux.

La Marquise, inquiète d'avoir dû laisser Clémence seule quelques instants même si elle était toujours présente au domaine, lâcha ce qu'elle tenait dans la main, une reliure semblait-il ou quelque chose qui y ressemblait avant de ne tomber par dessus le pont-levi pour mourrir dans le lit de rivière qui passait sagement dessous...

Le regard figé, l'air complètement stoïc...

Que dites-vous Fauchevent ! Vous avez bu ! Vos plaisanteries ne sont guère amusantes ! Alors soit vous m'annoncez réellement ce qui vous conduit à moi soit vous reprenez vos fonctions dans votre mirador à l'entrée du domaine et faites attention, si vous consommez à ce point de voir trouble et de confondre des passants avec mon époux, je vous ferez renvoyer sur le champ!

Fauchevent voulut pour commencer préciser que concernant son poste de travail, il ne s'agissait point d'un mirador mais d'un poste de guêt, mais quelque chose lui dit qu'il fairait mieux de reporter ces considérations techniques. Sage décision, mais qui ne le garda pas d'argumenter un tantinet.

Point d'la vie, j'bois guère plus m'Dame qu'aux fêtes et quand on m'offre le coup. Mais jamais pour la boisson, nenni, jamais.

Et voila, trop tard il avait encore ramenné sa fraise, et la Marquise au visage si doux d'ordinaire, était désormais rouge vif. Où en était-il déja? Ses doigts tellement serrés sur son casque le faisaient souffrir.

Eeeeerrr... l'marquis qu'est là quoi... l'ai vu d'mes yeux vu. L'est passé avec Norbert, tout mouillés et crottés qui z'étaient, pas d'chval, non m'Dame.
Et pis sont passé sous l'nez à Fauch'vent, en lui disant d'les annoncer, pis sont entrés dans l'ch'teau quoi.

...

Sur la tête d'Aristote m'Dame.

Matthilde n'en croyait pas ses oreilles... Fauchevent lui annonçait-il là la vérité... Son époux enfin de retour mais pourquoi par Aristote, pourquoi revenait-il à pieds comme un sans le sou... Que s'était-il donc passé ? Où était-il allé et....

Dans le chateau dites-vous !!! Par Aristote je ne l'ai guère croisé ! Mais ou s'est-il rendu !

Sans attendre, elle tourna le dos à Fauchevent le laissant les doigts meurtris dans son casque tant il semblait les avoir serrés et lui proposant de passer dans les cuisines pour s'y rafraîchir un peu, alors qu'elle filait à vive allure vers l'intérieur du chateau...

Albert, mais ou êtes vous donc ! Est-ce bien vous qui revenez là !

Dans la salle de garde, on était en train de placer des bûches dans la grande cheminée.

Près de la grande table, déposant ses frusques trempées, Norbert, trose nu, chantonnait en attendant l'arrivée d'une tenue propre.

Lorsqu'il vit la Marquise, ce dernier, pas gêné pour un sou par sa tenue, alla prestement la saluer, et s'inclina bien bas.

Madaaaaame, c't'un plaisir de reparaître devant vous, vous être aussi grâcieuse et digne que lors de mon départ. Le modeste serviteur que je suis est en joie.

Alors qu'elle s'apprêtait à rejoindre l'intérieur du Chateau, la Marquise croisa du regard au moment de se retourner la silhouette d'un homme plié, presque totalement dénudé, là sous ses yeux !

Elle en stoppa le pas immédiatement se retournant aussi spontanément lui ordonnant de se passer quelque chose sur le dos immédiatement !! ...

Norbert !!! Par Aristote mais que faites vous dans un tel acoutrement !!! Vous ne possedez que guenilles mais tout de même est-ce une raison pour vous présenter de la sorte devant ma personne ! Vous auriez dû prévoir qu'il aurait pu en être ainsi !!

Vous faite état de ma grâce et je vous en remercie mais Lui tournant toujours le dos, outrée par ce qu'elle avait pu aperçevoir... Je ne puis dire qu'il en va de même pour vous même si la grâce n'est point état que l'on vous demande de montrer un minimum de tenue allons !

Réalisant que Norbert avait disparu au même moment que son époux il y a à présent de nombreux mois, elle réalisa alors...

Et que faites-vous ici ? Ou est mon époux ? Je vous somme de me dire ce qui est arrivé ce qui lui est arrivé ! Et puis non ! Taisez-vous, je n'ai guère de temps à attendre ici à vous entendre parler ! Je vais le retrouver moi-même de ce pas !

Tout en sortant de la pièce oubliant de saluer le vieux bossu, elle pensa alors...

Albert, mon aimé, mais que s'est-il passé !! ? Je crois savoir ou vous trouver. Les cuisines sont souvent l'endroit qui appelle votre présence et étant donné l'état dans lequel se trouve ce vieux Norbert, je ne puis imaginer que vous ne soyez mal en point.

Soudain l'inquiétude se lisait sur le visage de Matthilde... L'inquiétude mêlée à la joie de le serrer à nouveau dans ses bras et enfin de pouvoir passer du temps à ses côtés... Enfin, c'était là l'objet de tous ses espoirs mais la crainte dominait une sorte de préssenti la conduisant droit vers les couloirs menant aux cuisines...

S'apprêtant à sortir décidée, elle se retrouva alors nez à nez avec son époux... D'autres n'auraient pu le reconnaitre tant son état était ... Mais pas elle... Ce regard, cette allure... Un cri presque étouffé sortit alors de sa bouche, le regard curieux scrutant le visage de son époux... Il semblait si...marqué...

Albert ? Mon aimé c'est bien vous ? Mais que .... Elle se tût soudain et peu importait l'état dans lequel il se trouvait, elle lui sauta au cou... Elle avait tant attendu ce retour !

Mais où étiez-vous dont passé par bleu ! Le visage dans le creu de son épaule ne pouvait être vu et les larmes sortirent de ses paupières ne pouvant les contenir tant elle était émue et soulagée de le voir vivant..

Albert la serra contre lui, heureux du moment présent.

Je réside hors des frontières du Royaume ma tendre amie, dernièrement je résidais sur la côte de la mer du nord, tantôt à Bruges, tantôt à Amsterdam.
Je me suis éloigné momentanément des affaires du Royaume de France. J'avais besoin de laisser derrière moi les sordides affaires qui ont lassé mon esprit, j'avais besoin de prendre le large.
J'attendais avec impatience l'occasion de rentrer chez nous, je dois repartir, mais à nouveau je reviendrais dès qu'il s'agira de célébrer quelque chose que nous partageons.

Je suis tellement heureux de vous retrouver tous, que ma fatigue semble oubliée.
Je vais prendre un bain, aussitôt après, tu me raconteras tout.

Elle appréciai l'instant présent, tant et tellement qu'elle ne pu croire ce qu'elle entendait ensuite... Un seul mot faisait raisonnance dans son esprit à présent... "repartir"...

Mais qui étaient-elles, Clémence et elle pour qu'il puisse à nouveau les abandonner c'était ainsi qu'elle ressentait la chose dans son esprit, dans son coeur et au plus profond de son âme...

Elle se desserra de lui, le regard humide mais presque froid à présent... La tête inclinée pour ne point montrer l'émotion qui avait pu prendre ses aises trop à son goût, elle se recula et lui répondit alors...

Bien, comme vous le souhaiterez, profitez de votre bain, vous devez en avoir grand besoin sans aucun doute... Lorsque vous aurez terminé vous n'aurez qu'à me rejoindre dans le salon des amis, Clémence m'y attend.